Un rêve de Roi
par Francis Delafosse - mars 2009
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C’est
à la suite de certaines circonstances fortuites d’origine familiale, que je fus
invité au printemps 1989 à la « Fondation Condé » de Chantilly, lieu de
résidence de Monseigneur Henri d’Orléans, Comte de Paris, Chef de la Maison de
France.
Descendant direct de notre dernier Roi Louis-Philippe 1er, puis
devenu dés 1940 l’héritier de l’une des plus grosses fortunes de notre pays, il
était cet homme à qui le Général De Gaulle déclarait un jour : « Vous, vous êtes
éternel, moi je ne suis que l’homme qui passe… ». |
Tout en lui assurant qu’il pensait même lui confier le destin de la France
dans le cadre d’une éventuelle restauration de la Monarchie
constitutionnelle.
L’histoire en décidera autrement…
C’est en pénétrant dans la salle du conseil d’administration de cette
Fondation que je me suis retrouvé face à l’illustre personnage.
Avec pour fond de décor, fleurs de lys et tableaux de maître, l’atmosphère
n’en restait pas moins détendue et je fus rapidement surpris de trouver là,
un homme de très grande allure mais aussi pourvu d’une étonnante simplicité.
Nous avons abordés principalement nos discussions sur la famille, le
travail et l’Europe. Il déclarait que seuls les pays à monarchie
parviendraient à conserver leurs repères et leur identité au sein de cette
nouvelle institution.
Deux heures plus tard, et avant de nous quitter, je lui offrais le livre de
Jean-Baptiste Meylan intitulé « Le Mont-Blanc vu du ciel » en l’invitant à
effectuer par hélicoptère le survol des parois et des sommets de ce
merveilleux massif Alpin.
Très attaché à la religion, il avait trouvé également fort intéressante
cette idée d’implantation du « Christ
du Secours en Montagne ». En acceptant
ma proposition, il s’offrait ainsi l’occasion d’admirer par lui-même cette
œuvre dans son cadre majestueux.
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Quelques temps plus tard, il n’hésita pas à en discuter avec son cardiologue
afin de savoir si son état de santé pourrait lui permettre une telle
« aventure ».
Dans l’attente de cet accord, le projet fut plusieurs fois reporté, mais
nous ne perdîmes jamais contact par une correspondance manuscrite régulière.
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Au
mois de septembre 1990, Georges Paillot, Professeur-Guide de l’Ecole
Nationale de Ski et d’Alpinisme, retrouve dans ses archives familiales,
« l’Opuscule de Louis d’Orléans » intitulé « Au Mont-Blanc » et me le remis
à l’attention du Comte. De ce récit racontant l’ascension effectué par cet
ancêtre, il se disait heureux d’avoir reçu cette archive, constatant combien
les mœurs et les comportements de cette époque avaient évolués. En
août 1994, une nouvelle lettre m’annonce son départ de Chantilly à
destination de l’Hôtel « Excelsior » de Montreux en Suisse pour un séjour de
plusieurs se- |
maines au cours duquel nous pourrions enfin mettre au point les modalités de
notre projet sur Chamonix. Il
est vrai que voilà déjà quatre années que nous attendions ce moment, et
comme il le disait déjà dans son courrier du 26 juillet 1989 :
« Dans la vie, on aime bien rêver et il m’est agréable de le faire de temps
en temps pour compenser tous les ennuis et difficultés que j’ai ».
Ce
baptême de l’air au dessus du « Toit de l’Europe » faisait vraiment partie
intégrante de ses rêves et je me faisais un honneur et une très grande joie
d’en être l’instigateur.
Il
ne me restait plus qu’à assumer et à concrétiser cette proposition le mieux
possible.
Je
pris très vite contact avec mon ami Pascal Brun, responsable de la Société C.M.B.H à Argentière. Réputé parmi l’un de nos meilleurs pilotes de
haute-montagne, nous avions souvent fait appel à ses services sur des
secours particulièrement difficiles et j’étais certain qu’à bord de son
Alouette version « Lama », le vol serait effectué en toute sécurité.
L’Adjointe au Maire de Chamonix chargée des relations publiques, mise au
courant de cette « visite Princière » propose aussitôt l’organisation d’une
réception en mairie. De son coté, le Comte me fait part de son offre
d’invitation pour l’ensemble des convives de mon choix dans le plus étoilé
des restaurants de la ville.
Tout cela me sembla de bonne augure d’autant plus qu’une météo radieuse
était annoncée dans les prochains jours. L’avant-veille du grand rendez-vous
à la « DZ des bois », site de décollage prévu de l’hélico, je reçois un coup
de fil du Comte sur les lieux mêmes de mon travail, la Base Hé- |
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licoptère Sécurité Civile d’Annecy. Se
déclarant profondément navré, il m’explique la situation, me demandant de
tout annuler. En
effet, sa Dame de compagnie, gouvernante et infirmière qui depuis des années
l’accompagne dans ses moindres déplacements se retrouve accidentée suite à
une mauvaise chute et ne pourra le suivre dans cette escapade chamoniarde.
Cela suffira pour le voir renoncer. Nous envisageons déjà une période plus
favorable et je m’efforce aussitôt de faire prévenir toutes les personnes
concernées.
Quelques temps après, son état de santé ne s’étant pas amélioré, sa toute
dernière lettre datera d’octobre 1995.
Quatre années plus tard, il sera inhumé dans la Chapelle Royale de Saint
Denis sans avoir pu réaliser ce dernier rêve, profiter d’une seule et belle
journée ensoleillée pour survoler les plus hauts et les plus beaux sommets
de notre terre de France.
Cette même France qui l’aura maintenu si longtemps dans l’ombre de son
« Histoire ».
Merci à
F. Delafosse d'avoir partagé, avec nous, ces moments si particuliers et ses
archives.
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